Le Premier ministre canadien Justin Trudeau (g) accueille le président français Emmanuel Macron dans sa résidence privée à Ottawa, au Canada, le 25 septembre 2024

Le Premier ministre canadien Justin Trudeau (g) accueille le président français Emmanuel Macron dans sa résidence privée à Ottawa, au Canada, le 25 septembre 2024

Emmanuel Macron et Justin Trudeau ont affiché jeudi leur détermination à œuvrer pour une économie "ouverte et décarbonée" et pour une coopération internationale sur l'intelligence artificielle, avec toujours en arrière-plan leurs propres difficultés politiques intérieures.

Comme mercredi soir à l'arrivée du président français au Canada pour un dîner en tête-à-tête entre les deux dirigeants, les hommes ont affiché jeudi matin leur proximité et leur vision commune sur de nombreux dossiers.

"La France et le Canada partagent une belle langue commune et des valeurs", a déclaré Justin Trudeau jugeant important de les partager dans le monde pour avoir un "impact positif dans ces moments de grands défis". Les deux pays ont par ailleurs annoncé renforcer leur partenariat de défense et leur soutien à l'Ukraine.

"Nous avons un agenda extrêmement aligné. Nous croyons dans les économies ouvertes, nous croyons dans la décarbonation de nos économies", a renchéri Emmanuel Macron évoquant son "bonheur" d'être là.

Comme un écho à une remarque qu'il avait fait peu avant lors d'un échange avec des personnalités francophones se demandant si la France était "heureuse".

Car malgré tout, les difficultés politiques intérieures des deux hommes ne sont jamais loin. Le Premier ministre et son hôte présidentiel, qui incarnaient tout deux une nouvelle génération de dirigeants, jeunes et audacieux, connaissent aujourd'hui les mêmes déconvenues.

Au sommet du G7 en Italie, peu après l'élection d'Emmanuel Macron en mai 2017, leur complicité affichée avait fait couler beaucoup d'encre. Une "bromance" (romance fraternelle), avaient alors lâché des commentateurs.

Sept ans plus tard, Emmanuel Macron a perdu les élections législatives qu'il avait lui-même convoquées et partage désormais le pouvoir avec un Premier ministre de droite.

Justin Trudeau, lâché par son principal allié de gauche, est extrêmement fragilisé, impopulaire et reste à la merci d'autres motions de censure, tout comme son homologue français Michel Barnier à Matignon.

- Défendre la langue française -

Le président français qui accueille le Sommet de la Francophonie dans une semaine à Villers-Cotterêts (nord) avait aussi rendez-vous avec des défenseurs de la langue française, un grand enjeu au Canada où cette langue est en déclin.

"Vous êtes porteurs de la francophonie en milieu minoritaire, d'une langue, de ce qu'elle charrie avec elle", leur a dit Emmanuel Macron. Il ne faut "pas simplement que le français résiste mais qu'on puisse continuer dans les jeunes générations à l'inoculer", a-t-il ajouté. Le Canada est un pays bilingue mais seul le Québec est francophone.

C'est d'ailleurs dans cette province qu'Emmanuel Macron et Justin Trudeau ont choisi de se rendre pour la deuxième partie de cette visite officielle. Lors d'un déjeuner avec des experts, ils s'entretiendront d'intelligence artificielle avant de tenir une conférence de presse commune à Montréal.

Le Canada est un pays en pointe sur l'IA, ce qui intéresse particulièrement Paris, à quelques mois d'un sommet sur le sujet en février en France.

Emmanuel Macron vantera aussi "l'attractivité de la France" auprès d'investisseurs canadiens, comme il l'a fait mardi à New York lors d'échanges avec des grands noms de la finance, a souligné l'Elysée.

L'instabilité politique et les débats sur la hausse des impôts en France suscitent une inquiétude croissante dans le monde économique, y compris à l'international.

Rendez-vous incontournable, le président français s'entretiendra aussi avec le Premier ministre du Québec, François Legault. La rencontre aura lieu à Montréal, qui compte près de 200.000 Français, et non à Québec, ce qui a fait grincer des dents chez certains francophones, attachés au symbole de la "capitale" québécoise.

Ces derniers auront peut-être l'occasion d'évoquer la question de l'immigration, devenue aussi ces derniers mois un point de crispation pour le gouvernement québécois.

"Quand on écoute les débats en France, les gens ont le sentiment qu'ils sont en train de devenir minoritaires, qu'ils sont bousculés par l'immigration, qu'on vient les chercher chez eux dans leur propre langue et ils retrouvent du coup la passion d'une langue", a déclaré le président français dans la matinée.