(C) Université de Luxembourg
Cette question a été abordée par des scientifiques du Luxembourg Centre for Systems Biomedicine (LCSB) et de la Life Sciences Research Unit (LSRU) de l’Université du Luxembourg en collaboration avec des chercheurs américains.
En effet, les chercheurs ont réussi à déterminer les espèces clés de voûte de ces écosystèmes : « Elles assument une fonction essentielle dans l’écosystème », explique le professeur Dr Paul Wilmes, détenteur d’une bourse FNR ATTRACT et chef du projet : « De nombreuses autres espèces dépendent de leurs métabolites. Leur disparition pourrait avoir des conséquences dramatiques sur l’ensemble de l’écosystème. Mais si on soutient les espèces clés de voûte, la communauté de vie se stabilise. »
Importance sur le plan médical
Les résultats de l’équipe ont aussi une importance sur le plan médical : lorsque des communautés de microbes sont déstabilisées à cause d’une maladie, le fait de soutenir de manière ciblée les espèces bactériennes centrales peut dans certaines conditions avoir des bienfaits sur la santé.
Le directeur du LCSB, Prof. Dr Rudi Balling, explique: « Nous partons du postulat que des pathologies comme la maladie de Parkinson peuvent trouver leur origine dans le dysfonctionnement de la composition des communautés de vie microbiennes dans le corps humain. Ces connaissances sur les espèces clés de voûte nous aideront à l’avenir à analyser de plus près les causes moléculaires et à étudier des mesures permettant de reconstruire l’équilibre écologique de l’intestin, par exemple. »
Des gènes clés déterminent les espèces clés de voûte
Pour cette étude-ci, Paul Wilmes et son équipe ont prélevé des échantillons de bassins d’épuration à différents moments de l’année. Ils ont ensuite identifié la totalité des gènes, analysé ceux qui sont transcrits et obtenu un aperçu des protéines résultant de cette transcription. Les protéines sont indispensables pour notre organisme car elles déterminent presque toutes les fonctions biochimiques, structurelles et organisationnelles de notre organisme.
Les bactéries moins nombreuses, mais possédant de multiples exemplaires de gènes uniques primordiaux (les chercheurs parlent de « gènes clés », qui peuvent donc être transcrits à une fréquence disproportionnellement élevée, sont beaucoup plus importantes.
« Nous avons pu reconstruire sur ordinateur le réseau du métabolisme de toute la communauté d’organismes », explique Dr Anna Heintz-Buschart, scientifique au LCSB et principale auteure de l’article. « Nous voyons ainsi quelles substances peuvent en principe être produites par la communauté de vie, quels gènes sont présents en plusieurs exemplaires dans différentes espèces bactériennes et en quelle quantité certaines protéines sont formées. »
De nouvelles technologies
Il était difficile jusqu’à présent pour les scientifiques d’analyser les dépendances auxquelles les bactéries sont soumises dans un écosystème complexe comme l’intestin, voire une station d’épuration biologique. La plupart du temps, ils déterminaient le nombre d’organismes de ces espèces qui apparaissent ensemble dans des conditions environnementales variables. Une densité similaire des bactéries est considérée comme indice d’interactions mutuelles.
« L’émergence des nouvelles technologies a ouvert des possibilités totalement inédites d’étude des écosystèmes », explique Paul Wilmes. « Grâce aux analyses à haut débit, dans le cadre desquelles nous saisissons de très grandes quantités de données, nous pouvons à présent reconstruire sur ordinateur les réseaux du métabolisme. Cela nous permet de comprendre comment les organismes s’influencent mutuellement. Ce qui nous importait particulièrement dans notre étude, c’était d’identifier les gènes clés spécifiques qui jouent un rôle central dans le métabolisme des communautés microbiennes. Nous avons ensuite pu attribuer ces gènes à des espèces clés de voûte bien précises. »
Auteur : Université de Luxembourg
Photo © Université de Luxembourg
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L’étude vient d’être publiée dans la nouvelle revue spécialisée du groupe Nature Publishing Group, « npj Biofilms and Microbiomes » : http://www.nature.com/articles/npjbiofilms20157.