Cannabis

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Après une volonté dans l’accord de coalition du gouvernement luxembourgeois, de légaliser la consommation et la vente du cannabis, des discussions tournent actuellement autour d’une légalisation uniquement de la consommation et de la production à des fins personnels.

En fait, les effets potentiels d’une légalisation du cannabis non médical sont multiples. On peut postuler qu’un accès facilité génère une augmentation de la consommation ou, au contraire, que des campagnes de prévention ciblées la réduise. Ou que la légalisation fait augmenter la qualité des produits contrôlés par rapport aux produits du marché noir?

Cet article résume l’état des connaissances scientifiques sur les effets observés suite à la légalisation de la possession et vente du cannabis dans certains Etats des Etats-Unis (USA), au Canada (CA) et en Uruguay (UY). Il présente également des statistiques sur certains pays européens ayant décriminalisé la consommation de cannabis – mais pas sa production –: les Pays-Bas (NL), le Portugal (PT) et la Belgique (BE).

Plus précisément l’article (et le rapport plus complet, en-dessous de l’article) analyse les associations d'une légalisation du cannabis avec l’évolution d’indicateurs tels que:

Marché

  • prix des produits
  • teneur en THC des produits
  • taille du marché noir.

Consommation et perception des risques

  • consommation de cannabis (fréquence, quantité, dosage), notamment chez les mineurs
  • perception des risques.

Santé et sécurité routière

  • effets négatifs sur la santé (intoxications, troubles psychiques, dépendance)
  • nombre d’accidents de la route.

Criminalité

  • nombre d’arrestations et d’activités criminelles

Pourquoi légaliser le cannabis?

Le cannabis est la substance illégale la plus consommée au monde, et de loin. En Europe, 8% des personnes interrogées disent en avoir pris durant l’année écoulée, les moyennes nationales se répartissant entre 4% et 22%. L’un des objectifs centraux de sa criminalisation – la réduction de son usage– ne semble pas être atteint.

Le statut illégal du cannabis a des conséquences négatives: il criminalise des citoyens responsables, sollicite fortement le système policier et judiciaire et alimente le trafic de stupéfiants, soutenant ainsi les organisations criminelles.

C’est pourquoi de nombreuses voix appellent régulièrement à un changement de régime qui verrait la consommation et la possession de cannabis – voire également sa vente et sa production – être tolérées, décriminalisées ou carrément légalisées.

Les avantages d’un tel changement semblent à première vue évidents. Légaliser la consommation arrêterait de criminaliser inutilement des citoyens et soulagerait le système policier et judiciaire. Légaliser la vente et la production réduirait le trafic de stupéfiants et la criminalité associée, permettrait de contrôler la qualité et aiderait à cibler les messages de prévention.

De nombreux pays discutent ainsi de projets de légalisation.

Au Luxembourg, la consommation et la possession de cannabis à fins personnelles a été décriminalisée en 2001. Depuis 2018 une loi permet "l’usage médical du cannabis dans des cas exceptionnels et limités au profit de certaines catégories spécifiques de patients" (sante.public.lu). Fin 2018, le gouvernement a annoncé la volonté de réglementer la production, l’achat, la possession et la consommation de cannabis à des fins non médicales pour les besoins personnels des résidents majeurs. Il n’est pas encore définitivement clair à ce stade, si ou comment le Luxembourg va légaliser le cannabis, respectivement quels volets (production, achat, vente, possession, consommation) une éventuelle légalisation va comprendre.

Alors, pourquoi ne pas légaliser le cannabis?

Les résistances à une légalisation du cannabis sont multiples. Certaines voix rejettent les stupéfiants de manière catégorique, d’autres redoutent que le cannabis ne mène à des drogues plus dures. On peut imaginer que la perception des dangers du cannabis baisse une fois son usage est normalisé, ou supposer qu’un accès facilité au cannabis en magasin ne fasse croître la consommation en général – exacerbant ainsi ses effets médicaux et sociaux négatifs – et notamment chez les jeunes. On peut en craindre pour la sécurité routière ou les accidents de travail.

Mais surtout, on peut se demander si les avantages supposés (mais aussi les désavantages) d’une légalisation se vérifient vraiment dans la réalité. Cet article tente de répondre à cette question en se basant sur les analyses scientifiques disponibles.

Quels pays ont légalisé le cannabis?

Les pays gèrent le cannabis de manière très variée. Certains punissent lourdement la simple consommation (la possession et la consommation non médicale de cannabis est illégale dans plus de 150 pays). D’autres la tolèrent (elle n’est en pratique plus sanctionnée), ou l’ont décriminalisée, (elle est devenue une infraction bénigne passible d’une simple amende). P.ex. le partage de cannabis au sein de coopératives est toléré en Espagne, la vente en magasin l’est aux Pays-Bas. En fait une trentaine de pays ont décriminalisé ou dépénalisé le cannabis. 

Il faut souligner que certains régimes sont différents d’une légalisation complète: les coffee shop néerlandais n’ayant pas de source légale de cannabis, ils doivent s’approvisionner sur le marché noir auprès de producteurs travaillant dans l’illégalité.

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Différents types de légalisation

Il est important de distinguer les différents types de légalisation. Celle de la consommation et de possession à usage personnel affecte la criminalisation des personnes consommant, mais ne permet normalement pas la création de magasins légaux, qui exige la légalisation de la vente. Un vrai marché légal passe par la légalisation de la production et permet de contrôler mieux le marché et la qualité des produits. Les régimes de légalisation aux Etats-Unis, au Canada et en Uruguay ont permis la création d’un marché légal, ce qui n’est pas le cas aux Pays-Bas, au Portugal et en Belgique.

Seuls trois pays ont légalisé la consommation, possession, vente et production du cannabis: en Uruguay en 2013, dans une quinzaine d’États des États-Unis depuis 2014 et au Canada en 2018. L’expérience de ces pays devrait – en principe – permettre de vérifier si la légalisation a généré, on non, les effets positifs ou négatifs attendus.

Infobox

Situation aux Etats-Unis

Aux Etats-Unis, 16 Etats ont légalisé la consommation récréative de cannabis; un marché légal et régulé est présent dans 10 Etats, couvrant un quart de la population américaines, notamment les Etats du Colorado, Washington et Oregon qui disposent d’un marché depuis 2014, 2014 et 2015. Il est à noter que ces derniers avaient déjà un marché de cannabis médical bien établi avant la légalisation, ce qui rend plus difficile l’évaluation de l’impact de la légalisation généralisée.

Les régulations diffèrent fortement entre les Etats, par exemple la nature de l’autorité de régulation, la taxation, le type de produits et notamment la teneur maximale en THC, le système de licences ou encore l’autorisation de cumuler les étapes (production, distribution, vente) ou non. La vente est limitée aux personnes âgées d’au moins 21 ans. La consommation n’est légale qu’en privé. La possession est limitée à une once (28 grammes, soit des centaines de doses usuelles de THC de 10 mg).

Des tests en laboratoire sont obligatoires pour tous les produits commercialisés, notamment pour le taux de THC et de CBD ainsi que pour la présence de contaminants. Les emballages doivent éviter d’attirer les enfants ou de leur permettre un accès facile. Les magasins ne peuvent vendre d’autres produits et doivent respecter des règles additionnelles, par exemple respecter une certaine distance des lieux fréquentés par les enfants. La publicité visant les mineurs est interdite; certains Etats demandent la présence de messages de prévention, et la plupart ont lancé des campagnes d’information pour une consommation modérée ou pour expliciter les risques pour les jeunes et les femmes enceintes. Le traçage sur la chaîne de production, distribution et vente est obligatoire dans le but d’éviter que les produits légaux n’arrivent sur le marché noir.

Les règles sur la conduite de véhicules motorisés varient, allant de la tolérance zéro à un taux de 5 ng/ml dans le sang, tout comme le type de tests pouvant être réalisés.

Situation au Canada

Le Canada a légalisé le cannabis non médical en octobre 2018, notamment dans le but de réduire le marché noir ainsi que l’accès au plus jeunes. La production ainsi que les normes de santé et de sécurité sont réglementées au niveau fédéral. Les provinces ont une grande autonomie pour réglementer la distribution, la vente et la consommation en public. Il existe ainsi une grande hétérogénéité entre les provinces, par exemple sur l’âge minimal pour acheter (18, 19 ou 21 ans), la possession maximale (30 g, 150 g, 1 kg, etc.), l’autorisation ou non de cultiver chez soi ou de consommer en public.

Le type de points de vente varie selon les provinces: exclusivement privés, étatiques, ou présence des deux types (notamment pour l’achat en ligne, qui est géré par le gouvernement dans de nombreuses provinces).

Situation en Uruguay

L’Uruguay est le premier pays à avoir légalisé la consommation récréative de cannabis en 2013. La production et la vente sont non commerciales et régulées par l’État. Il est possible de cultiver soi-même le cannabis, de joindre un Club social de cannabis partageant les produits ou d’acheter le cannabis en pharmacie. Les consommateurs et consommatrices doivent s’enregistrer auprès d’une institution étatique. La publicité est interdite. Le prix, la teneur en THC et la qualité des produits vendus en pharmacie sont contrôlés par l’État. Le gouvernement a mis en place en 2014 un système d’indicateurs sanitaires et sociaux pour évaluer l’impact de la légalisation.

Situation aux Pays-Bas, Portugal et en Belgique

Cet article et le rapport incluent trois pays européens ayant connu la décriminalisation ou dépénalisation du cannabis.

Les Pays-Bas ont dépénalisé la possession de cannabis au début des années 1970. Des coffee shops vendant du cannabis ont ouvert quelques années plus tard. Une loi limitant la vente aux résidents fut introduite en 2013 afin de limiter le tourisme lié au cannabis, mais ne fut pas appliquée de manière étendue [10]. La production n’est pas tolérée et entretient ainsi un marché noir. En 2019, le gouvernement a lancé un projet pilote de production légale de cannabis pour fournir des magasins dans 10 municipalités.

Le Portugal est l’un des premiers pays à avoir décriminalisé la consommation de cannabis (et d’autres drogues) en 2001, mais la vente et la cultivation restent interdites.

La Belgique a décriminalisé la possession de petites quantités de cannabis entre 2003 et 2014. Les Clubs sociaux de cannabis restent tolérés.

Des données insuffisantes

Hélas, les statistiques et les analyses scientifiques disponibles ne permettent en général pas d’établir de causalité. Dans de nombreux cas, les indicateurs (comme le nombre de personnes ayant récemment consommé) n’ont pas changé de manière claire, ou alors de manière trop diversifiée. Et même si un changement clair est observé, les études n’arrivent souvent pas à démontrer qu’il est bien dû à la légalisation – et non pas simplement à une évolution qui aurait eu lieu de toute façon, également sans légalisation.

Pour disposer de données plus fiables, d’adresser ces lacunes et pour pouvoir évaluer l’impact d’une éventuelle légalisation (partielle), il serait intéressant que le Luxembourg lance des études à long terme sur les effets sanitaires et sociétaux du cannabis, notamment avant un éventuel changement de régime. Cette mesure permettrait de disposer de données solides pour une évaluation ultérieure de l’impact du changement.

La légalisation fait-elle augmenter la consommation?

C’est la question centrale du débat: l’accès grandement facilité au cannabis en magasin pousse-t-il les gens à davantage consommer? Une telle évolution serait globalement négative, à l’instar d’une consommation croissante d’alcool: le cannabis génère des risques de dépendance et peut avoir des effets négatifs sur la santé (notamment sur le plan psychique) ainsi que pour la société (qui prend par exemple en charge les coûts des thérapies).

Les expériences sur le terrain ne permettent malheureusement pas d’y répondre. La consommation du cannabis a souvent augmenté dans les pays et Etats des Etats-Unis ayant opté pour la légalisation, mais des croissances similaires ont été également observées dans très nombreux pays ou Etats qui n’ont pas légalisé.

Les prévalences (les proportions de gens ayant consommé du cannabis, par exemple durant le dernier mois) observées dans les différents pays européens diffèrent fortement, indépendamment du statut légal du cannabis. La situation varie au sein des pays ayant décriminalisé la consommation: aux Pays-Bas, la prévalence est légèrement supérieure à la moyenne européenne, elle est légèrement inférieure en Belgique ou clairement plus basse au Portugal.

Les études scientifiques ne peuvent ainsi pas attribuer un effet causal entre légalisation ou décriminalisation et augmentation de la consommation.

Et chez les mineurs?

Là aussi, les chiffres ne permettent de tirer aucune conclusion. Par exemple, une étude relève une augmentation de 20% de la probabilité d’avoir consommée dans le dernier mois chez les 12-17 ans en Californie (où le cannabis est légal depuis 2018), alors qu’une autre portant sur tous les Etats ayant légalisé rapporte une diminution de 8% de la prévalence chez les 14-17 ans. Et une troisième analyse n’observe pas de changements notables dans les Etats de Washington et du Colorado (légalisation en 2014).

Les gens minimisent-ils les risques du cannabis?

Pas de réponse claire. D’un côté, la légalisation devrait faciliter des campagnes de prévention ciblées, avec par exemple des messages sur les produits ou en magasin. D’un autre côté, elle normalise la consommation du cannabis, ce qui pourrait soutenir le message implicite qu’elle n’est pas dangereuse. Là aussi, les études n’aboutissent pas à des conclusions définitives.

Les enquêtes faites dans les trois pays ayant légalisé le cannabis ne signalent pas de changements clairs dans la perception des risques. Au Canada, des sondages menés avant et après la légalisation n’ont pas montré de changements significatifs des représentations sur le cannabis, y compris chez les adolescents de 13-14 ans. Point intéressant: près de la moitié d’entre eux voient la légalisation de manière négative

La légalisation fait-elle augmenter les problèmes de santé?

En partie: les hospitalisations dues à une intoxication au cannabis ont doublé aux Etats-Unis, notamment à cause de produits comestibles (cookies) plus fortement dosés ou qui sont ingérés par des enfants. Mais il s’agit là de problèmes relativement rares, notamment comparé aux problèmes de dépendance. Et pour ces derniers, la réponse n’est pas claire: les études étatsuniennes relèvent une hausse des cas de dépendance chez les 12-17 ans comparée aux Etats sans légalisation, mais pas chez les 18-25 ans.

Et les accidents de la route?

Peut-être. Une crainte est que davantage de gens conduisent un véhicule après avoir consommé du cannabis. Aux Etats-Unis, des études ont pu associer à la légalisation une croissance du nombre d’accidents mortels de la circulation ainsi qu’une augmentation des tests positif de THC chez les conducteurs. Mais les régimes de test ayant souvent été modifiés après la légalisation, il n’est ici pas possible de démontrer une causalité.

La législation change-t-elle les produits et les prix?

Clairement. Les magasins vendent des produits plus diversifiés, notamment des comestibles (cookies, etc.) et des cartouches pour vaporisateurs. Les taux moyens de THC ont augmenté. Les prix ont évolué de manière différente. Au Canada, le prix du cannabis légal est resté stable mais celui du marché noir a baissé de 40%. Aux Etats-Unis, le prix dans les magasins a diminué fortement les premières années qui ont suivi la légalisation. Selon des sondages menés aux Etats-Unis, 40% consommateurs sont d’avis que la qualité a augmenté, mais les analyses relèvent la présence de nombreux pesticides – bien plus que dans le cannabis produit pour un usage médical.

La législation réduit-elle le marché noir et la criminalité?

Clairement. Les ventes sur le marché noir se sont réduites de 30% à 40%, selon l’expérience aux Etats-Unis. Au Canada, le marché noir a réagi en baissant ses prix, mais a vu ses ventes tout de même diminuer, sa part de marché baissant de 92% à 76% durant les douze mois ayant suivi la légalisation. Une comparaison entre les différentes provinces du pays indique que le marché noir s’est d’autant plus réduit que les produits légaux étaient bon marché, disponibles (pas de rupture de stock) et accessibles (densité importante des magasins).

Moins d’arrestations

Sans surprise, les taux d’arrestations liés au cannabis ont très fortement chuté dans les pays l’ayant légalisé. Quelques études relèvent que certains Etats ayant légalisé montrent un taux d’élucidation de crimes plus élevé, ce qui pourrait suggérer que la légalisation a libéré des ressources policières pour d’autres infractions.

Faut-il craindre un tourisme du cannabis?

C’est possible. Des agences proposent même des voyages thématiques dans certains Etats américains ayant légalisé le cannabis. De nombreuses destinations européennes sont connues pour attirer un tourisme de la drogue telles que Lisbonne, Ibiza, Prague ou surtout Amsterdam. En 2012, les Pays-Bas ont tenté de lutter contre le phénomène avec une loi n’autorisant la vente qu’à des résidents, mais elle n’est pratiquement pas mise en œuvre par les municipalités. Début 2021, Amsterdam a annoncé vouloir effectuer des contrôles pour assurer le respect de cette règle, ce qui suscité des craintes qu’elle ne dirige les touristes vers le marché noir. Mais les études quantitatives sur cette question manquent. Le modèle discuté au Luxembourg prévoit lui aussi que la vente serait réservée aux résidents. Selon de nouveaux révélations, il est aussi possible que la vente ne sera pas légalisé du tout, juste la production et la consommation pour des besoins personnels…

 

Auteur: Daniel Saraga (Saraga Communications)
Editeurs: Michèle Weber (FNR), Jean-Paul Bertemes (FNR)

 

Si vous voulez plus de détails, veuillez lire le rapport complet ci-dessous.

 

Article complet, avec tous les détails

 

1. Résumé

Les effets potentiels d’une légalisation du cannabis non médical sont multiples. On peut postuler qu’un accès facilité génère une augmentation de la consommation ou, au contraire, que des campagnes de prévention ciblées la réduise.

Ce document résume l’état des connaissances scientifiques sur les effets observés suite à la légalisation de la possession et vente du cannabis dans certains Etats des Etats-Unis (USA), au Canada (CA) et en Uruguay (UY). Il présente également des statistiques sur certains pays européens ayant décriminalisé la consommation de cannabis – mais pas sa production –: les Pays-Bas (NL), le Portugal (PT) et la Belgique (BE).

Ces analyses ne peuvent que très rarement démontrer un effet causal. Elles établissent par exemple des augmentations de la prévalence de la consommation de cannabis, mais sans pouvoir en attribuer la cause à la légalisation de manière claire, d’autre causes pouvant être en jeu. Davantage de recul et des études additionnelles seront nécessaires pour démontrer ou infirmer des causalités.

Il est important que le Luxembourg lance des études à long terme sur les effets sanitaires et sociétaux du cannabis au plus vite, notamment avant un éventuel changement de régime. Cette mesure permettrait de disposer de données solides pour une évaluation ultérieure de l’impact du changement.

Nous présentons ici les principales conclusions du rapport.

Marché

La légalisation du commerce de cannabis – en plus de celle de la consommation – a vu la création et l’essor d’un marché légal avec l’ouverture de très nombreux points de vente. Il s’est accompagné d’une diversification des produits avec l’essor des comestibles et des vaporisateurs (conclusion d’études faites aux USA et au Canada), a généré des emplois et des recettes fiscales importantes (études faites aux USA). Les prix légaux sont restés stables (CA) ou ont baissé (US). Les taux moyens de THC des produits vendus ont augmenté (USA). Le marché noir s’est réduit à environ 30-40% des ventes (USA). La qualité des produits vendus est fortement contrôlée par l’État (UY); elle est perçue par 40% des consommateurs comme ayant augmenté (USA), mais les analyses en laboratoire n’y sont pas strictement normées et montrent des différences importantes. Un tourisme de la drogue s’est établi (NL).

Consommation et perception des risques

Indépendamment du statut légal du cannabis, les prévalences de consommation ont augmenté de manière générale dans de nombreux pays et Etats des Etats-Unis. Elles ont davantage augmenté dans les Etats ayant adopté la légalisation (USA, UY) ou sont restée stables après la légalisation (CA). Les prévalences sont légèrement supérieures (NL) à la moyenne européenne, légèrement inférieures (BE) ou clairement plus basses (PT). On ne peut pas attribuer un effet causal entre légalisation ou décriminalisation et augmentation de la consommation.

Santé et sécurité routière

Les hospitalisations dues à une intoxication au cannabis ont doublé (USA); elles ont augmenté mais sans que les statistiques soient solides (CA). Les données sont contrastées en ce qui concerne les troubles psychiques et de dépendance (USA). Elles n’indiquent pas d’influence sur la consommation d’alcool.

On peut associer à la légalisation une augmentation du nombre d’accidents mortels de la circulation et des tests positif de THC chez les conducteurs (USA), sans pouvoir établir de causalité (p.ex. en raison de régimes de test modifiés).

Criminalité

Les arrestations liées au cannabis ont fortement chuté (USA, CA). Aux Pays-Bas, les activités criminelles liées à la production de cannabis se sont maintenues.

2. Contexte

Discussions sur la légalisation du cannabis au Luxembourg

La consommation et la possession de cannabis à fins personnelles a été décriminalisée au Luxembourg en 2001. Fin 2018, le gouvernement a annoncé la volonté de réglementer la production, l’achat, la possession et la consommation de cannabis à des fins non médicales pour les besoins personnels des résidents majeurs [1]. Cette proposition a fait à nouveau l’objet de discussions à la Chambre des députés en 2021. Elle soulève de nombreuses questions sur les effets attendus ou possibles d’une légalisation sur les plans sanitaires, sociaux ou encore économiques.

Différents types de légalisation

Il est important de distinguer les différents types de légalisation. Celle de la consommation et de possession à usage personnel affecte la criminalisation des personnes consommant, mais ne permet normalement pas la création de magasins légaux, qui exige la légalisation de la vente. Un vrai marché légal passe par la légalisation de la production et permet de contrôler mieux le marché et la qualité des produits. Les régimes de légalisation aux Etats-Unis, au Canada et en Uruguay ont permis la création d’un marché légal, ce qui n’est pas le cas aux Pays-Bas, au Portugal et en Belgique.

Glossaire

Nous définissons ici des termes importants du rapport.

  • Décriminalisation: une infraction (p.ex., la possession de cannabis) passe du code pénal au code civil sanctionnée par exemple d’une simple amende d’ordre [2], [3]
  • Dépénalisation: une infraction n’est plus poursuivie (similaire au concept de «tolérance»)
  • Légalisation: l’acte ne constitue plus une infraction
  • THC: principale substance psychoactive du cannabis
  • Comestibles: préparations comestibles de produits contenant du cannabis (biscuits, etc.)
  • Prévalence: proportion d’une population
  • Différence ou évolution statistiquement significative: différence ou évolution suffisamment grande par rapport aux fluctuations naturelles pour indiquer qu’elles ne sont pas fortuites
  • Démonstration de causation ou causalité: preuve qu’un changement ou une situation (p.ex., la légalisation) contribue à produire un changement (p.ex. dans un indicateur).

Objectif et portée du rapport

Ce document résume l’état des connaissances scientifiques sur les effets observés suite à la légalisation de la possession et vente du cannabis dans certains Etats des Etats-Unis, le Canada et en Uruguay et présente des statistiques sur une sélection de pays européens ayant décriminalisé la consommation de cannabis: les Pays-Bas, le Portugal et la Belgique.

Il n’aborde pas en détail les effets sanitaires et sociaux du cannabis, qui font l’objet d’une autre publication [4]. Il ne juge aucunement de la pertinence des arguments politiques.

Questions abordées

Ce rapport tente d’apporter des réponses sur les effets possibles de la légalisation et décriminalisation, en analysant les effets ses associations avec l’évolution d’indicateurs tels que:

Marché

  • prix des produits
  • teneur en THC des produits
  • taille du marché noir.

Consommation et perception des risques

  • consommation de cannabis (fréquence, quantité, dosage), notamment chez les mineurs
  • perception des risques.

Santé et sécurité routière

  • effets négatifs sur la santé (intoxications, troubles psychiques, dépendance)
  • nombre d’accidents de la route.

Criminalité

  • nombre d’arrestations et d’activités criminelles.

Fiabilité des indices et preuves

Hétérogènes et en quantité limitée, les analyses scientifiques et les statistiques disponibles ne permettent pas d’établir les causalités nécessaires pour répondre à de nombreuses questions. Cela est notamment dû aux raisons suivantes [5]:

  • certains pays et Etats n’ont légalisé le cannabis que relativement récemment, un manque de recul qui ne permet pas de fournir des données solides sur les effets observés;
  • la plupart des études comparent la situation avant et après la légalisation, ce qui ne permet pas d’isoler l’effet de la légalisation d’autre évolutions ayant eu lieu indépendamment (par exemple, une augmentation de la consommation observée auparavant ou dans des pays ou Etats voisins sans légalisation, ou encore la présence préalable d’un marché légal de cannabis médicinal ayant déjà modifié des habitudes);
  • la recherche sur le cannabis est bien moins poussée que par exemple sur l’alcool ou le tabac.

Types d’indices relevés par des d’études scientifiques ou statistiques

Il est crucial de souligner l’adage: «Corrélation n’est pas causation». Il signifie ici que l’évolution temporelle d’un indicateur après la légalisation ou sa différence avec un pays ou Etat n’ayant pas légalisé le cannabis ne suffit largement pas à démontrer qu’il s’agit d’une conséquence de la légalisation. Il peut en effet s’agir de différences historiques, ou d’une évolution naturelle ou liée à d’autres effets. De plus, ces changements peuvent s’avérer être «statistiquement non significatifs», c’est-à-dire que des fluctuations naturelles pourraient également les expliquer. Ce rapport introduit quatre types d’indices de fiabilité:

 

fiabilité

signification

-

un indicateur reste stable ou évolue de manières opposées dans différents pays ou Etats

*

un indicateur évolue avant/après la légalisation ou est différent entre des pays ou Etats avec/sans légalisation, sans qu’il soit indiqué si ces différences sont statistiquement significatives ou non

**

l’évolution ou la différence est statistiquement significative (ce qui suggère qu’elle n’est pas fortuite) mais sans qu’un effet causal ne soit démontré

***

des études établissent un effet causal de la légalisation sur un indicateur (p.ex. la prévalence de consommation).

Ce sont les causalités démontrées scientifiquement par des métanalyses qui peuvent le mieux orienter les décisions politiques. Fournir de telles preuves est possible dans le cas d’indicateurs particulièrement simples, comme la création d’emplois, qui peuvent être logiquement reliées à l’autorisation d’ouvrir des magasins. Dans les autres cas, cela exige des analyses complexes et notamment des comparaisons avec des groupes contrôles, comme entre deux villes dont l’une adopte une mesure et l’autre pas.

Sources

Ce document est principalement basé sur la publication Revue de littérature sur l’impact de la légalisation du cannabis aux Etats-Unis, au Canada et en Uruguay [5] publiée en juin 2021 par Addiction suisse, le centre suisse de compétences dans le domaine des addictions, et qui se base sur 181 études scientifiques et rapports. Elle soutient toutes les déclarations de ce document qui concernent les Etats-Unis, le Canada et l’Uruguay, et n’est donc pas cité à chaque fois. Il distingue les quatre types d’indices décrits ci-dessus.

Pour les autres pays nous citons explicitement les sources. Celles-ci ne communiquent le plus souvent que des résultats de type - ou * qui ne permettent aucunement d’un déduire un effet causal de la légalisation ou de la décriminalisation.

Ces sources primaires ou secondaires comprennent uniquement des travaux scientifiques ou des rapports statistiques gouvernementaux et pas de rapports publiés d’ONG ou think-tanks ni d’articles de médias.

3. Conséquences possibles de la légalisation et fiabilité des indices

On peut identifier nombre d’hypothèses sur les conséquences positives ou négatives de la légalisation de la consommation et du commerce de cannabis. Pour chacune d’elle, nous indiquons la fiabilité des indices disponibles (-, *, ** ou ***). Cette interprétation se base sur les conclusions présentées dans la section 4. Expériences de pays et d’états ayant légalisé ou décriminalisé le cannabis.

 

Effet

positif

fiabilité

négatif

fiabilité

 

Marché

Création de magasins

Objectif de la légalisation

***

 

 

 

Diversification de l’offre

Réduction (en proportion) de la consommation du cannabis par inhalation de fumée et donc de tabac

*

Augmentation de la consommation de comestibles, plus accessibles aux enfants, et de vaporisateurs – des produits ayant des taux élevés de THC

*

 

Augmentation du dosage des produits vendus (THC)

 

**

Effets sanitaires et sociaux négatifs plus importants

-

 

Baisse des prix

Dépenses réduites pour les drogues.

-

Augmentation de la consommation

Une baisse du prix sur le marché noir maintient ce dernier

-

*

 

Contrôle de la qualité

Moins de produits toxiques.

Meilleur dosage possible par les consommateurs.

*

-

 

 

 

Messages de prévention

Prévention ciblée dans les magasins et sur les emballages et financées par les recettes fiscales

-

La normalisation fait baisser la perception des risques

-

 

Création d’emploi

Création d’emploi

***

 

 

 

Augmentation des recettes fiscales

Augmentation des recettes

Financement de campagnes de prévention et de thérapies

***

-

 

 

 

Réduction du marché noir

Baisse de la criminalité liée au trafic de drogues

***

Fuite des produits légaux vers les mineurs

Fuite vers les pays ou Etats voisins (tourisme de la drogue)

-

**

 

Consommation et perception des risques

Perception des risques

La prévention ciblée augmente la perception des risques, par exemple auprès des femmes enceintes ou des conducteurs

-

La normalisation fait baisser la perception des risques

-

 

Augmentation de la consommation (facilité d’accès, exposition plus grande, confiance dans les produits, diversité des produits, normalisation sociale de la consommation)

 

 

Augmentation de la consommation

Augmentation chez les mineurs

**

-

 

Santé et sécurité routière

Accès facilité

 

 

Augmentation des effets négatifs:

  • intoxications
  • psychiques
  • sociétaux
  • du trafic routier

 

*

-

-

**

 

Prévention ciblée

Baisse des effets négatifs

  • sanitaires
  • pour le trafic routier

 

-

-

 

 

 

Diversification des produits

Baisse des effets négatifs de l’inhalation de la fumée

-

Effets négatifs de produits plus fortement dosés tels qu’intoxication (notamment d’enfants via les comestibles)

Plus de dépendance et troubles psychiques

*

 

-

 

 

Substitution à l’alcool et baisse de ses effets négatifs

-

Combinaison avec l’alcool et binge-drinking

-

 

Criminalité

 

Baisse de nombre de gens jugés comme criminels, baisse des discriminations.

*

Hausse de la criminalité dans les pays/Etats voisins

-

 

 

Libération des ressources des systèmes policiers, juridiques et pénitenciers pour d’autres délits.

-

 

 

 

 

Situation légale dans différents pays

La possession et la consommation non médicale de cannabis est illégale dans plus de 150 pays [6]. Une trentaine de pays les ont décriminalisées (les faisant passer d’infractions pénales en infractions relevant du code civil) ou dépénalisées par un régime de tolérance qui ne les poursuit plus. Certains pays tolèrent de plus la vente en magasin ou l’échange dans des coopératives (clubs sociaux de cannabis). Seuls trois pays ont légalisé sa consommation ainsi que sa vente en magasin, permettant l’essor d’un vrai marché légal.

Les pays analysés dans ce document sont indiqués en gras dans le tableau.

Pays

Date

Notes

Consommation et vente légales

Uruguay

2013

Régulation étatique des produits, pas de magasins privés

Etats-Unis (16 Etats)

2014 (Etats du Colorado et de Washington)

Régulations différentes entre les Etats

Canada

2018

Régulations différentes entre les provinces

Consommation légale, vente interdite

Géorgie

2018

 

Mexique

2021

 

Afrique du Sud

(2021/2022)

La loi doit être encore ratifiée

Consommation décriminalisée ou dépénalisée en Europe (extrait)

Pays-Bas

Années 1970

Vente tolérée en magasin («coffee shops»)

Portugal

2001

Y compris les autres drogues

Belgique

De 2003 à 2014

Les clubs sociaux de cannabis sont encore tolérés

Luxembourg

2001

Décriminalisation de la consommation (amende), vente autorisée de cannabis CBD (<1% THC)

Espagne

1983 [7]

Vente interdite mais clubs sociaux de cannabis tolérés

République tchèque

2010

 

Suisse

2012

Le cannabis CBD (<1% THC) est vendu légalement en magasin

 

 

Situation légale du cannabis dans différents pays.

Europe

La situation légale dans les pays de l’Union européenne varie sensiblement avec des peines différentes pour la consommation et la possession de cannabis, certaines pouvant inclure une possible incarcération.

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Sanctions pour consommation de cannabis dans l’Union européenne [2]

Etats-Unis

Aux Etats-Unis, 16 Etats ont légalisé la consommation récréative de cannabis; un marché légal et régulé est présent dans 10 Etats, couvrant un quart de la population américaines, notamment les Etats du Colorado, Washington et Oregon qui disposent d’un marché depuis 2014, 2014 et 2015. Il est à noter que ces derniers avaient déjà un marché de cannabis médical bien établi avant la légalisation, ce qui rend plus difficile l’évaluation de l’impact de la légalisation généralisée.

Les régulations diffèrent fortement entre les Etats, par exemple la nature de l’autorité de régulation, la taxation, le type de produits et notamment la teneur maximale en THC, le système de licences ou encore l’autorisation de cumuler les étapes (production, distribution, vente) ou non. La vente est limitée aux personnes âgées d’au moins 21 ans. La consommation n’est légale qu’en privé. La possession est limitée à une once (28 grammes, soit des centaines de doses usuelles de THC de 10 mg).

Des tests en laboratoire sont obligatoires pour tous les produits commercialisés, notamment pour le taux de THC et de CBD ainsi que pour la présence de contaminants. Les emballages doivent éviter d’attirer les enfants ou de leur permettre un accès facile. Les magasins ne peuvent vendre d’autres produits et doivent respecter des règles additionnelles, par exemple respecter une certaine distance des lieux fréquentés par les enfants. La publicité visant les mineurs est interdite; certains Etats demandent la présence de messages de prévention, et la plupart ont lancé des campagnes d’information pour une consommation modérée ou pour expliciter les risques pour les jeunes et les femmes enceintes. Le traçage sur la chaîne de production, distribution et vente est obligatoire dans le but d’éviter que les produits légaux n’arrivent sur le marché noir.

Les règles sur la conduite de véhicules motorisés varient, allant de la tolérance zéro à un taux de 5 ng/ml dans le sang, tout comme le type de tests pouvant être réalisés.

Canada

Le Canada a légalisé le cannabis non médical en octobre 2018, notamment dans le but de réduire le marché noir ainsi que l’accès au plus jeunes. La production ainsi que les normes de santé et de sécurité sont réglementées au niveau fédéral. Les provinces ont une grande autonomie pour réglementer la distribution, la vente et la consommation en public. Il existe ainsi une grande hétérogénéité entre les provinces, par exemple sur l’âge minimal pour acheter (18, 19 ou 21 ans), la possession maximale (30 g, 150 g, 1 kg, etc.), l’autorisation ou non de cultiver chez soi ou de consommer en public [8].

Le type de points de vente varie selon les provinces: exclusivement privés, étatiques, ou présence des deux types (notamment pour l’achat en ligne, qui est géré par le gouvernement dans de nombreuses provinces) [9].

Uruguay

L’Uruguay est le premier pays à avoir légalisé la consommation récréative de cannabis en 2013. La production et la vente sont non commerciales et régulées par l’État. Il est possible de cultiver soi-même le cannabis, de joindre un Club social de cannabis partageant les produits ou d’acheter le cannabis en pharmacie. Les consommateurs et consommatrices doivent s’enregistrer auprès d’une institution étatique. La publicité est interdite. Le prix, la teneur en THC et la qualité des produits vendus en pharmacie sont contrôlés par l’État. Le gouvernement a mis en place en 2014 un système d’indicateurs sanitaires et sociaux pour évaluer l’impact de la légalisation.

Pays-Bas, Portugal et Belgique

Ce rapport inclut trois pays européens ayant connu la décriminalisation ou dépénalisation du cannabis.

Les Pays-Bas ont dépénalisé la possession de cannabis au début des années 1970. Des coffee shops vendant du cannabis ont ouvert quelques années plus tard. Une loi limitant la vente aux résidents fut introduite en 2013 afin de limiter le tourisme lié au cannabis, mais ne fut pas appliquée de manière étendue [10]. La production n’est pas tolérée et entretient ainsi un marché noir. En 2019, le gouvernement a lancé un projet pilote de production légale de cannabis pour fournir des magasins dans 10 municipalités [11].

Le Portugal est l’un des premiers pays à avoir décriminalisé la consommation de cannabis (et d’autres drogues) en 2001, mais la vente et la cultivation restent interdites [12].

La Belgique a décriminalisé la possession de petites quantités de cannabis entre 2003 et 2014. Les Clubs sociaux de cannabis restent tolérés [13].

Marché

Etats-Unis

Le marché légal a crû rapidement de 20-30% par an depuis 2014 et pourrait atteindre les 13 milliards de dollars annuels. Par exemple, les ventes au Colorado sont passée de 300 millions de dollars en 2014 à 1,4 milliards en 2019. On estime qu’environ 300 000 emplois à temps pleins ont été créés suite à la légalisation. La palette des produits s’est fortement diversifiée avec différentes sortes d’herbe et de concentrés solides, des comestibles et des cartouches pour vaporisateurs.

Le taux moyen de THC des fleurs saisies par les autorités a doublé passant de 8,9% en 2008 à 17.1% en 2017, une évolution nationale et donc pas limitée aux Etats ayant connu la légalisation. Au Colorado, ce taux est passé de 16,4% en 2014 à 19,6% en 2017. Il est à noter que les analyses en laboratoire ne sont pas encadrées par de normes et montrent des différences importantes. Ils indiquent des niveaux élevés de pesticides résiduels, dont certains interdits, bien plus que dans pour le cannabis à usage médical.

La part de marché de l’herbe séchée s’est réduite au profit de vaporisateur et de comestibles, qui sont souvent plus concentrés en THC. Quatre consommateurs sur dix estiment que le cannabis légal est de meilleure qualité et moins risqué, un sur trois qu’il est plus cher.

Les prix ont fortement baissé (par exemple, de 20 dollars par gramme à 10 en 2015 puis 7 en 2016 dans l’Etat de Washington.

Le taux fiscal doit en principe être suffisant pour compenser les coûts liés à la régulation et à la prévention, mais pas trop élevé pour éviter de faire monter les prix et de pousser les consommateurs à retourner au marché noir. Le système d’imposition fiscal (sur le prix ou sur la teneur en THC) pourrait avoir un impact sur l’offre, les magasins tentant de réduire leur charge fiscale.

On estime que le marché noir représente 30-40% des ventes dans les Etats ayant légalisé le cannabis, une moitié pour le marché légal et le reste pour la production individuelle.

Canada

La légalisation très récente n’offre que peu de recul. Plus de 400 magasins ont ouvert, proposant des produits diversifiés. Les ventes en ligne représentent de 10% à 20%. Les recettes durant l’année suivant la législation sont estimées à 900 millions de dollars. L’essor du marché légal a réduit le marché noir: la part produits acquis de manière légale a augmenté de 7,8% à 23,7% dans les 12 mois suivant la légalisation; la proportion de gens déclarant s’être approvisionné sur le marché noir a baissé de 51,7% à 40,1%.

Le prix du cannabis légal est resté stable (env. USD 10/g) alors que celui du marché noir a fortement baissé (à USD 6), tout en proposant des produits à plus haute teneur en THC que dans les magasins.

Uruguay

Les études sont très lacunaires. Les achats auprès de vendeur illégaux ont chuté de 58% à 11% entre 2014 et 2018. Une enquête nationale de 2018 indique qu’un consommateur sur trois avait utilisé le marché légal, suggérant le marché noir reste très présent. A noter que les prix bas fixés par le gouvernement pourraient encourager la revente sur le marché noir, notamment aux touristes.

Pays-Bas, Portugal et Belgique

De nombreux magasins vendant du cannabis ont ouvert aux Pays-Bas. Leur approvisionnement se fait sur le marché noir car la production, le stockage et la distribution restent non-tolérées et punies. Cette situation paradoxale maintient des activités criminelles du côté de l’approvisionnement et créé un flou juridique pour certaines tâches quotidiennes des coffee-shops (achat, transport, entreposage) [14]. Un tourisme de la drogue s’est développé, Amsterdam attirant de nombreux voyageurs s’y rendant notamment pour consommer du cannabis: quelque 16% des touristes auraient visité un coffee shop en 2009 [15] et certaines statistiques estiment que les touristes achètent globalement autant de cannabis que les résidents, ce qui stimule la production et la vente [14]. Le marché a vu l’essor de magasins de taille grandissante qui poursuivent des objectifs de croissance économique et ont pris la place de nombreux petits coffee shops portés davantage par une vision libertaire et idéologique [14].

Le marché étant illégal et non toléré au Portugal et en Belgique, ces pays ne fournissent pas d’indice sur cette question.

​​​​​​​Consommation et perception des risques

Quel que soit le statut légal du cannabis, les prévalences de consommation ont beaucoup varié dans les différents pays d’Europe et Etats des Etats-Unis depuis les années 2000. Elles montrent en général une tendance à l’augmentation.

Europe

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Prévalence historique et en 2018 d’une consommation de cannabis chez les jeunes adultes durant les douze derniers mois en Europe [16].

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Evolution de la prévalence de consommation de cannabis durant les douze derniers mois dans certains pays européens, centrée sur l’année d’un changement des sanctions pour possession de cannabis [2]. Une association entre prévalence et changement des sanctions ne peut pas être mise en évidence.

Etats-Unis

Les prévalences de consommation ont augmenté au niveau national entre 2002 et 2018 (soit une période débutant bien avant les différentes légalisations), passant d’environ 6% à 10% de gens déclarant avoir consommé au cours du dernier mois. Elles ont plus fortement augmenté dans les Etats ayant légalisé le cannabis depuis les années 2000, passant de 8% à 17% au Colorado et dans l’Etat de Washington ou de 10% à 16% en Californie, un trend qui s’est poursuivi après la légalisation. Elles sont plus élevées que la moyenne nationale, mais l’étaient déjà avant la légalisation, peut-être en partie à cause de du cannabis médical qui y était légal. Il est difficile d’attribuer une relation causale entre légalisation et augmentation de la consommation, ce qui nécessiterait de démêler d’autres facteurs explicatifs, comme les éventuels changements dans la manière dont les sondés témoignent de leur consommation réelle.

Les résultats d’études sur la consommation des mineurs (12-17 ans) sont contrastés. Une étude en Californie associe par exemple à la légalisation une augmentation de 20% de la probabilité d’avoir consommée dans le dernier mois. Une analyse associe une diminution de 8% de la prévalence chez les 14-17 ans dans les Etats ayant légalisé. Une autre étude rapporte l’absence de changements, entre 2002 et 2016 dans l’Etat de Washington ou entre 2013 et 2017 au Colorado. Au niveau national, cette prévalence a légèrement baissé de 8% à 7% entre 2002 et 2018.

La prévalence de consommation chez les femmes enceintes a doublé de 3,4% à 7% entre 2002 et 2017, mais les données limitées ne permettent pas de conclure à une causalité.

La perception des risques, par exemple associés à une consommation hebdomadaire de cannabis, a légèrement baissé au niveau national, passant de 32,3% des sondés à 29.2% entre 2015 et 2019. Certaines études restreintes suggèrent une attitude plus favorable face au cannabis.

Canada

Les études indiquent que le pourcentage de personnes de plus de quinze ans consommant du cannabis tous les jours est resté stable entre 2018 et 2019 (seule une province, la Colombie-Britannique, a montré une augmentation de 5,4% à 8,4%). A l’inverse, la proportion de personnes déclarant avoir consommé durant les trois derniers mois a augmenté de 14% à 18%, portée notamment par les jeunes hommes de 18 à 24 ans (qui passent de 28,6% à 46,4%) [17]. A noter que la prévalence avait augmenté de 9,4% à 14,8% entre 2004 à 2017, soit durant la période précédant la légalisation. Elle avait diminué chez les 15-17 ans, était restée stable chez les 18-24 ans et avait augmenté chez les 25-64 ans.

Les produits se sont diversifiés avec une légère baisse du cannabis fumé et une augmentation des autres modes (vaporisateurs, comestibles). Il est à noter que ces chiffres ne permettent pas d’attribuer une causalité due à la légalisation en raison de l’absence de comparaisons, de la présence de fluctuations naturelles et de la très courte durée de la période d’observation.

Des enquêtes faites juste avant et après la légalisation n’ont pas montré de changements significatifs des représentations sur le cannabis, y compris chez les adolescents de 13-14 ans (45% de ces derniers ayant une perception négative de la légalisation du cannabis). Deux tiers des sondés se disent préoccupés des risques posés par un accès aux comestibles plus aisé pour les enfants.

Uruguay

La consommation a fortement augmenté. La prévalence de la consommation durant le dernier mois est passée de 4,9% à 8,9% entre 2011 et 2018, notamment portée par les mineurs et le groupe des 26-35 ans. Chez les 13-17 ans, elle est passée de 7,5% à 11%, et la prévalence à vie (avoir fait au moins une expérience avec du cannabis) a augmenté de 16,4 % à 24,8% entre 2011 et 2018. Il faut souligner que cette évolution n’est pas forcément liée à la légalisation, des augmentations ayant été observées chez des groupes de populations similaires au Chili, pays n’ayant pas connu de légalisation.

La proportion de la population indiquant une perception élevée des risques associés au cannabis, qui avait baissé avant la légalisation, est légèrement remontée depuis (68,3% en 2011, 61,9% en 2014, 64,1% en 2018). Une baisse plus marquée avait eu lieu chez les 13-17 ans, qui distinguent fortement les risques d’une consommation fréquente (75,4% en 2003 et 55% en 2014) de ceux d’une expérience unique (37,5% en 2003 et 7,6% en 2018).

Pays-Bas, Portugal et Belgique

Aux Pays-Bas, la prévalence de consommation durant les 12 derniers mois chez les 15-34 ans en 2020 (17,1%) était légèrement supérieure à la moyenne européenne (15%) [16]. La prévalence chez les 15-16 ans y était comparable à celles observées aux Etats-Unis et au Canada en 2005, soit avant la légalisation dans ces deux derniers pays. Cela suggère – sans en apporter la preuve – que le statut décriminalisé du cannabis aux Pays-Bas n’avait pas entraîné pas une consommation plus élevée chez les adolescents [18]. Pour de nombreux scientifiques, la dépénalisation du cannabis aux Pays-Bas n’avait pas provoqué d’augmentation de la consommation chez les adultes, ni le passage vers de drogues dures [14].

Au Portugal, la prévalence de consommation durant les 12 derniers mois chez les 15-34 ans (6,7% en 2007 et 8% en 2020) représente environ la moitié de la moyenne européenne (12,1% et 15%, respectivement) [16] [19], mais il n’est pas explicité si une association avec la décriminalisation peut ou non être établie, notamment car des prévalences aussi faibles s’observent également dans d’autres pays sans décriminalisation (GR, HU, LT, RO).

En Belgique, la prévalence de consommation dans les douze derniers mois chez les 15-34 ans (13,6%) est légèrement inférieure à la moyenne européenne (15%) [16].

​​​​​​​Santé et sécurité routière

Etats-Unis

Dans le Colorado, la proportion des hospitalisations dues à une intoxication aiguë au cannabis a doublé, passant de 0,015% durant la période 2001-2009 à 0,028% (2010-2013). Les appels aux centres antipoison ont augmenté pour les cas d’ingestion de comestibles au cannabis, notamment chez les enfants, alors qu’il a diminué pour l’inhalation de fumée.

Les données ne permettent pas d’évaluer l’impact de la légalisation sur les troubles psychiques. Des études indiquent que la légalisation est associée à une augmentation de la prévalence de trouble d’utilisation du cannabis (consommation dépendante) chez les 12-17 ans , qui est passée de 2,2% à 2,7% et est 25% plus élevée que dans les autres Etats – mais un changement n’a pas été observé chez les 18-25 ans. Au niveau national, le nombre d’admissions pour traitements de dépendance au cannabis a diminué, et la légalisation ne semble pas avoir d’impact.

Les études disponibles n’ont pas relevé de changement significatif dans la consommation et la vente de tabac lié à la légalisation, ni dans la consommation ou la vente d’alcool. Elles n’ont pu déterminer si le cannabis peut devenir un substitut à l’alcool ou est au contraire utilisé comme complément, ni s’il réduit la consommation d’opioïdes, par exemple dans la gestion de la douleur.

La légalisation est associée à une augmentation du nombre d’accidents mortels de la circulation et des tests positif de THC chez les personnes conduisant un véhicule, mais les résultats des études restent contrastés, certaines indiquant un changement avant/après la légalisation, d’autres pas. Au Colorado, le nombre de décès lié aux accidents de la route ont augmenté de 31%, et de 109% lorsque la personne conduisant avait été testée positive au THC. Une étude montre que la probabilité d’un test positif d’un conducteur est 48% plus élevée dans les Etats ayant légalisé le cannabis et 17% que dans les Etats l’ayant décriminalisé. Mais une relation causale ne peut être établie, notamment parce que la politique et les procédures des tests peuvent avoir changé suite à la légalisation. Une autre étude au Colorado montre que la proportion d’adultes ayant indiqué avoir conduit après avoir consommé du cannabis est restée stable (3%), également après la légalisation.

Canada

Les études sont rares. Elles suggèrent une augmentation des hospitalisations liées au cannabis, mais qui ne peut être soutenue par des statistiques solides. Des études supplémentaires seront nécessaires.

La proportion des hospitalisations des garçons de 10-14 ans associées au cannabis a doublé de 0,005% à 0,009% entre 2017 et 2019, mais de manière statistiquement non significative. Aucun changement significatif n’a également été observé chez les garçons de 15-19 ans ou chez les filles. Des études faites en Alberta indiquent une augmentation nette du nombre de visites aux urgences ou des appels passés au centre antipoison; d’autres en Ontario ne montrent pas d’augmentation.

Une évaluation de l’impact de la légalisation sur la sécurité routière n’est pas encore possible. La prévalence de consommateurs de cannabis ayant indiqué avoir conduit dans les deux heures après avoir consommé est resté stable à environ 14%.

Uruguay

Les très rares études n’ont pas relevé de changements significatifs de signes de troubles psychiques liés au cannabis entre 2011 et 2018,

Le taux de mortalité des conducteurs de véhicules légers a fortement augmenté de plus de 50% entre 2012 et 2017, porté par les régions urbaines, mais pas celui des motocyclistes, une augmentation pouvant être associée à la légalisation.

Pays-Bas, Portugal et Belgique

Aux Pays-Bas, une étude relève une forte hausse des admissions pour un premier traitement d’une dépendance au cannabis qui sont passées de 7 à 20 par 100 000 habitants entre 2000 et 2015 [20]. Les auteurs l’associent à une hausse du taux de THC. Mais cette évolution ne peut être associé à la dépénalisation elle-même, qui avait été mise en place bien avant.

​​​​​​​Criminalité

Etats-Unis

Le taux d’arrestations liés au cannabis a chuté de 75% chez les Etats ayant légalisé ou décriminalisé le cannabis. Il a par contre augmenté dans certains comptés d’Etats sans légalisation situé à la frontière du Colorado et de Washington State, ce qui suggère un effet de débordement. Ces études indiquent que la criminalité générale y a au contraire baissé, notamment pour les voies de fait, les larcins et les infractions contre la propriété.

Des études indiquent une association entre la législation et un taux plus élevé d’élucidation des crimes violents et contre la propriété s’est améliorée, suggérant qu’elle libère des ressources policières.

Canada

Le taux d’arrestations liées au cannabis a fortement chuté (99,6%) suite à la légalisation, accélérant une évolution observée déjà avant (baisse de 35% entre 2014 et 2017).

Uruguay

La proportion d’infractions associées aux drogues a baissé de 12% à 8% entre 2010 et 2017.

Pays-Bas, Portugal et Belgique

Au Portugal, une étude chiffre à 18% les baisses coûts sociaux (frais de justice et d’incarcération, santé, etc.) de l’usage de toutes les drogues (pas seulement le cannabis) durant les onze après la décriminalisation [21].

Aux Pays-Bas, la production de cannabis reste activement punie par les autorités. Il existe des indices que ces activités criminelles ont augmenté, se professionnalisant avec l’essor d’opérations à plus large échelle et contrôlées par des groupes poursuivant d’autres activités criminelles. De manière un peu paradoxale, la lutte gouvernementale contre la production pourrait avoir poussé certains coffee shop néerlandais à s’approvisionner à l’étranger [14].[DS1] 

5. Références

 

[1]

National drug report: the drug phenomenon in the Grand Duchy of Luxembourg: trends and developments, National Focal Point in Luxembourg, 2020.

[2]

Cannabis legislation in Europe, European Monitoring Centre for Drugs and Drug Addiction (EMCDDA), 2017, pp. 1-30.

[3]

C. Hughes, A. Stevens, S. Hulme and R. Cassidy, “Models for the decriminalisation, depenalisation and diversion of illicit drug possession: An international realist review,” 2019.

[4]

“XXXXXX,” Science.lu, FNR, 2021.

[5]

S. V. a. Z. F., “Revue de littérature sur la légalisation du cannabis aux Etats-Unis, au Canada et en Uruguay,” Addiction Suisse, 2021.

[6]

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[7]

J. F. Gamella, M. Luisa and J. Rodrigo, “A brief history of cannabis policies in Spain (1968-2003),” 2004.

[8]

Wikipedia, “Cannabis laws of Canada by province or territory,” [Online].

[9]

“Where can I buy pot? A coast-to-coast guide for marijuana legalization day.,” Global News, [Online]. Available: https://globalnews.ca/news/4557947/where-to-buy-marijuana-cannabis-canada-provinces.

[10]

Wikipedia, “Drug policy of the Netherlands,” 2021. [Online].

[11]

“Controlled cannabis supply chain experiment.,” Government of the Netherlands, [Online]. Available: https://www.government.nl/topics/drugs/controlled-cannabis-supply-chain-experiment.

[12]

“Cannabis in Portugal – Laws, Uses, History, and more info,” Sensi Seeds, [Online]. Available: https://sensiseeds.com/en/blog/countries/cannabis-in-portugal-laws-use-history.

[13]

T. Decorte, “Cannabis Regulation in Europe: Country Report Belgium,” Transnational Institute, 2019.

[14]

T. B. Van Solinge, “ The Dutch Model of Cannabis Decriminalization and Tolerated Retail.,” Dual Markets, p. 145–169, 2017.

[15]

T. Pinheiro Dias Pereira and L. de Paula, “Drug Tourism: General Overview, Case Studies and New Perspectives in the Contemporary World,” European Journal of Tourism, Hospitality and Recreation, pp. 7(3), 188–202, 2016.

[16]

Trends and developments, European Monitoring Centre for Drugs and Drug Addiction, 2020.

[17]

J. M. Robinson, C. P. M. A. Copeland, A. Meyer and M. D. Krank, “The Impact of Cannabis Legalization in Canada on Adolescents’ Perceptions,” Journal of Drug Issues, pp. 50(3), 235–241, (2020).

[18]

B. Simons-Morton, W. Pickett, B. W. T. F. M. Bogt and W. Vollebergh, “Cross-national comparison of Adolescent drinking and cannabis use in the United States, Canada, and the Netherlands,” International Journal of Drug Policy, 2009.

[19]

Drug Policy Profiles: Portugal, European Monitoring Centre for Drugs and Drug Addiction, 2011.

[20]

T. Freeman and et al., “Changes in cannabis potency and first-time admissions to drug treatment: a 16-year study in the Netherlands,” Psychological Medicine, pp. 48(14), 2346-2352, 2017.

[21]

R. Gonçalves, A. Lourenço and S. N. da Silva, “A social cost perspective in the wake of the Portuguese strategy for the fight against drugs,” International Journal of Drug Policy, pp. 26(2), 199–209, 2015.

[22]

V. Schmidhauser, Revue de littérature sur l ’ impact de la légalisation du cannabis aux Etats-Unis , au Canada et en Uruguay, 2021.

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