André Mousset
Comment le tram de Luxembourg freine-t-il ?
Il y a plusieurs systèmes de freinage.
Si possible le tram utilise le freinage dynamique. Ce freinage permet de générer du courant électrique, lorsque le tram freine. Il est dû aux machines asynchrones qui fonctionnent en moteurs pour la propulsion ou bien en générateurs pour le freinage. Une partie de l’énergie cinétique de la rame est alors transformée en énergie électrique laquelle est réinjectée dans la LAC (ligne aérienne de contact) et utilisée par d’autres rames. Ce freinage est encore appelé freinage régénératif ou freinage électrique par récupération d’énergie.
Lors des périodes de freinage, il faut donc inverser le sens du couple de forces à fournir par les machines asynchrones ce qui revient à changer le sens du champ magnétique tournant. La conversion de l’énergie mécanique en énergie électrique se fait grâce au phénomène de l’induction électromagnétique. L’énergie électrique ainsi produite est renvoyée dans la caténaire quand cela est possible, sinon cette énergie est dissipée par effet Joule, dans des résistances ; il s'agit alors de freinage rhéostatique.
Or le freinage dynamique s’atténue à fur et à mesure que la vitesse diminue ! C’est pourquoi les rames sont équipées encore de deux autres systèmes de freinage : le freinage à disques pour le freinage normal et le freinage électromagnétique pour le freinage d’urgence. En effet, en cas de freinage d’urgence, à cause de la faible adhérence des roues sur le rail, les freins à disque ne conviennent pas car ils risqueraient de bloquer complètement les roues et d’entraîner leur glissement sur les rails. Le freinage électromagnétique, par contre, est dû à un patin aimanté descendant directement sur les rails. La puissante force magnétique d’attraction entre le patin et les rails en fer crée une importante force de frottement provoquant un freinage vigoureux.
Finalement le tram dispose d’un système de freinage consistant à sabler dans certains cas, c'est-à-dire d'envoyer du sable sur la voie au moyen de sablières, pour éviter le patinage des roues.
Comment le tram prend-t-il des virages ?
Dans un virage, les longueurs à parcourir sur les deux rails sont forcément différentes. Les roues de droite et de gauche doivent donc tourner à des vitesses différentes si on veut que les roues ne patinent pas. Pour les voitures, ceci est garanti par un ensemble d’engrenages appelé différentiel. Pour le train et le tram, la solution est bien plus simple.
A cause de l’inertie, dans un virage, le tram est déporté légèrement vers l’extérieur du virage. Par exemple, si le tram prend un virage vers la droite il est légèrement déporté vers la gauche. A cause de la conicité du profil des roues, le rayon de la roue de droite au point de contact avec le rail est plus grand que celui de la roue de gauche. La roue de droite effectue donc automatiquement un chemin plus long que la roue de gauche pour une même vitesse de rotation.
Cette solution ne permet pas de prendre des virages très serrés. Plus l’écartement des roues est petit, plus la différence de longueur des deux rails est faible, donc plus le virage peut être serré.
Le tram moderne de Luxembourg comporte des roues motrices indépendantes, dont les vitesses sont contrôlées électroniquement. Si dans un virage, une roue motrice commence à patiner, la vitesse de rotation de la roue est automatiquement ajustée afin de rétablir l’adhérence de la roue au rail. Dans les virages serrés, un système de graissage des roues permet de réduire le crissement désagréable et l’usure excessive des roues et des rails.
Figure schématique et photo : Tram roulant vers l’intérieur du plan de la figure et prenant un virage vers la droite : la roue de gauche à rayon plus grand (rouge) effectue un chemin plus long que la roue de droite à rayon plus petit (bleu).
Le tram est-il sensible aux intempéries ?
Il arrive évidemment que la gorge des rails s’encombre de pierres, de feuilles mortes ou d’autres petites saletés.
Les pierres ne constituent aucun problème : elles sont écrasées par les roues. Les grosses pierres sur les rails sont enlevées par un chasse-pierre se trouvant juste devant les premières roues de la rame.
Les feuilles mortes par contre se transforment en une pâte glissante lorsqu’elles sont écrasées par les roues. Ce qui a pour effet de diminuer l’adhérence des roues aux rails. Or celle-ci est nécessaire pour accélérer, pour prendre des virages, pour monter ou descendre des rampes et pour freiner. Il ne faut en aucun cas que les roues glissent sur les rails. Cela engendrait la détérioration rapide des roues aussi bien que des rails avec risque de fusion du rail à cause de l’importante chaleur produite. C’est pourquoi les roues motrices sont équipées d’un système électronique d’anti-patinage évitant le glissement des roues sur les rails en traction. Dès qu’une roue commence à glisser il se met en marche pour réduire l’effort de traction de la roue. Toutes les roues sont enfin équipées d’un système d’anti-enrayage évitant le glissement lors du freinage de la roue. Là aussi, dès qu’une roue glisse, le freinage est réduit afin de rétablir l’adhérence. Ce système correspond à l’ABS des voitures.
Photo : Rail-route pour le nettoyage des voies
Enfin, les voies peuvent être nettoyées par une balayeuse rail-route, équipé de pneus et de roues pour les rails. Et pour les lignes recouvertes de gazon, l'utilisation d'une tondeuse est nécessaire.
En cas de neige, une couche de 5 cm à 10 cm ne pose en principe pas de problème. La pression énorme des roues sur les rails fait disparaître la neige. À partir du moment où il en y a plus et que le protège-corps à l’avant du tramway pourrait la toucher et risquerait de casser, il faut déneiger devant le tramway. Un rail-route ouvrira les voies en raclant la neige devant le tram.
Globalement, ile semble que le trafic du tram est moins impacté par les chutes de neige que celui des bus car il dispose de voies sur un espace qui lui est spécialement réservé. Avec 5 cm de neige sur la route, un bus ne roulera plus que difficilement à cause des embouteillages qui s’en suivent. Même si le bus dispose de sa propre voie, un camion peut se mettre en travers. Sur les voies du tram, cela n’arrivera pas.
De même la formation de glace à l’intérieur des rails n’est pas trop impactant. Elle ne résiste pas à la pression énorme des roues.
Par contre, quand il fait très froid, c’est au niveau des fils de la LAC que la formation de glace peut être embêtante. Ainsi, quand il y a formation de givre, des rames circulent la nuit, à vide, de manière à ce que le givre ne recouvre pas les câbles aériens. Ou bien, on équipe le pantographe avec un archet spécial, rugueux, grattant et enlevant le givre.
Quand une couche de glace se forme sur le pantographe elle doit être manuellement cassée avant le départ de la rame.
Un système de chauffage installé uniquement aux stations de biberonnage du secteur sans LAC permet de déglacer le patin du tram ainsi que le dispositif de chargement. Ceci pour éviter qu’un court-circuit se formerait entre le dispositif de chargement et les rails.
Parfois les roues du tram risquent de patiner à cause de feuilles mortes accumulées sur les rails. Il y a alors du sable qui tombe devant la roue sur le rail dès que la roue patine. Le déclenchement se fait automatiquement, dès que l’adhérence roue-rail diminue. Et le plein se fait comme pour l’essence d’une voiture, avant chaque départ, le tram passe à la pompe et le chauffeur fait son plein.
Les pluies torrentielles ne posent pas de problèmes car les gorges des rails sont pourvues d’un système de drainage permettant d’évacuer les eaux de pluie.
Finalement, toutes les rames sont protégées contre la foudre par un paratonnerre installé sur leur toit.
Comment faire en sorte qu’une machine technique soit conviviale ?
Comme vous voyez, le tram est une machine technique très sophistiqué. Mais comme son devoir le plus important est de transporter des êtres humains, il faut veiller à ce que cette machine technique soit conviviale. C’est pour cela que beaucoup de travail a été investi pour le rendre le plus agréable que possible. Le design du tram de Luxembourg est le travail de coopération entre le constructeur et l’Agence Avant-Première ensemble avec des artistes de la lumière et de la couleur.
Il a été spécialement créé pour Luxembourg et veut s’intégrer à son architecture. Ses baies panoramiques s’ouvrent sur la ville et ses quartiers. La transparence des véhicules, avec des surfaces largement vitrées, permet de préserver la perméabilité visuelle. Ses larges portes, son plancher bas, ses espaces spacieux et ses matériaux qualitatifs en font un tram d’un très haut niveau de confort. L’éclairage intérieur à LED, apporte une ambiance douce qui varie en fonction du moment de la journée.
A l’intérieur, les teintes douces éveillent les sens et renforcent le repérage des portes. De jour, l’harmonie intérieure change en fonction de la lumière naturelle qui varie tout au long de la journée et des saisons. De nuit, l’éclairage intérieur se diffuse vers l’extérieur par touches colorées.
Les cinq teintes différentes pour les rames invitent les voyageurs à monter à bord pour découvrir une ambiance colorée différente au gré de leurs voyages.
Les passagers ont accès à des services de communication performants, avec des afficheurs intérieurs et des annonces sonores synchronisées. Il y a une prise USB par deux sièges.
En matière de sécurité, le tram intègre un système de vidéo-protection et un défibrillateur semi-automatique dans chaque rame en cas de d’urgence.
Êtes-vous devenus un accro du tram ?
Se passionner pour le tram, c’est découvrir une panoplie de systèmes techniques extrêmement variés. Leur fonctionnement fait appel à un grand nombre de phénomènes mécaniques, électriques, électroniques, électromagnétiques et thermodynamiques.
Bien que le tram ne soit qu’un moyen de transport de faible vitesse, il permet de faire de beaux voyages à travers la physique ! Découvrez plus dans nos deux autres parties sur la science derrière le tram :
Auteur : André Mousset
Photos : Luxtram et André Mousset
Figures schématiques : André Mousset
Mes remerciements vont aux collaborateurs de Luxtram, MM. Bélony et Chartz et surtout à M. Ehrmann, pour les précieuses informations et explications techniques !
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La charge électrique est « une propriété » (on n’en connaît pas encore la nature intime !) de certaines particules qui interagissent entre elles. Jusqu’à ce jour on a détecté deux sortes de charges : l’une est appelée « charge positive », l’autre « charge négative ». Les particules à même type de charge se repoussent tandis que les particules à types de charge différents s’attirent.
Les électrons ont tous une même charge négative. Ils se repoussent entre eux. Les protons sont tous une même charge positive et se repoussent également mutuellement. Par contre les électrons et les protons s’attirent. Les neutrons ne possèdent pas de charges donc n’interagissent pas de cette façon avec les électrons ou les protons.
La charge d’une particule est mesurable. Il se trouve que l’électron et le proton ont la même charge au signe près. C’est d’ailleurs la plus petite charge qu’on a pu détecter jusqu’à ce jour dans l’univers. Pour cette raison on l’appelle « charge élémentaire ». Elle est notée « e » : e = 1,6 10-19 C.
1 C = 1 coulomb : c’est l’unité de mesure avec laquelle on exprime la charge.
La tension électrique par rapport à la terre est l’énergie électrique que possède une charge de 1 C par rapport à la terre. Elle est mesurable et exprimée en volt.
En effet, une même particule chargée peut avoir beaucoup ou peu d’énergie, ou bien même n’avoir pas d’énergie du tout.
La tension électrique est encore appelée « différence de potentiel électrique ». On peut dire : la ligne aérienne de contact d'un tramway a un potentiel de 750 V et les rails reliés à la terre ont le potentiel 0 V. La tension entre la ligne et les rails (= la différence de potentiel entre la ligne et les rails) vaut alors 750 V.
La terre est par définition toujours au potentiel 0 V.
Un déplacement collectif de particules chargées est appelé « courant électrique ». Or ce sont justement les particules chargées qui possèdent l’énergie électrique. Un courant électrique correspond donc à un transport d’énergie électrique d’un endroit à un autre.
Dans les métaux, les particules chargées susceptibles de créer un courant électrique sont les électrons. En effet chaque atome dispose de un, deux, …, électrons libres, c’est-à-dire, non liés à l’atome. Ces électrons peuvent donc se déplacer à travers l’ensemble du corps métallique et former éventuellement un courant électrique. Pour cette raison les métaux font partie des substances qui conduisent le courant électrique : les « conducteurs électriques ». La vitesse de déplacement des électrons est environ 1 mm/s.
D’autres substances solides ne permettent pas la mise en mouvement collectif des électrons car tous les électrons sont liés aux atomes ou aux molécules. Ces matériaux sont appelés « isolants électriques ».
Dans les liquides, les particules chargées mobiles sont des ions, c’est-à-dire, des atomes, des molécules ou des fragments de molécules ayant un, deux, …, électrons en excès (ions négatifs) ou en défaut (ions positifs). La vitesse de déplacement des ions y est environ 0,01 mm/s.
Dans les gaz, les particules chargées sont à la fois des ions et des électrons. La vitesse de déplacement varie beaucoup et peut être très grande.
Le courant électrique n’est détectable que pas ses effets : échauffement, réactions chimiques dans les liquides, apparition d’un champ magnétique, émission de rayonnements lumineux.
Le courant électrique circule dans un circuit électrique fermé, c’est-à-dire, en partant d’un point, à travers un ensemble de conducteurs électriques, et revenant au point de départ. Pour qu’un courant prenne naissance il faut que deux points du circuit aient des potentiels électriques différents. C’est-à-dire qu’il existe une tension électrique entre deux points du circuit. Le rôle de créer cette tension revient au générateur électrique placé dans le circuit : pile, accumulateur, génératrice, cellule photovoltaïque, …
L’intensité de courant électrique est la quantité de charge qui traverse une section du conducteur par seconde. Elle correspond au débit de l’eau s’écoulant dans une rivière.
Elle est mesurable et exprimée en ampère. Un fil est traversé par un courant de d’intensité 1 A si une charge de 1 C traverse la section du fil en 1 seconde.
Plus l’intensité est élevée, plus l’énergie transportée par le courant est élevée, et plus les effets du courants sont donc importants : échauffement plus important, davantage de réactions chimiques par unité de temps, champ magnétique plus fort, effet lumineux plus important.
Les générateurs de tension continue ont un pôle positif fixe et un pôle négatif fixe. Exemple : pile ou accumulateur. Par définition le courant électrique sort du pôle positif et circule vers le pôle négatif par lequel il entre. Or, si le courant est dû à des électrons (de charge négative), les électrons sortent du générateur par le pôle négatif et rentrent par le pôle positif. Un tel courant est continu car il circule toujours dans le même sens.
Les générateurs de tension alternative changent constamment de polarité. Cela veut dire que le courant circule tantôt dans un sens, tantôt dans l’autre sens. Le courant est alternatif.
Un champ magnétique est une région de l’espace dans laquelle des actions magnétiques peuvent être mises en évidence. Ces actions magnétiques sont des forces s’exerçant sur des aimants, des courants électriques ou bien des particules électriquement chargées en mouvement. (En fait, des particules chargées en mouvement sont équivalents à un courant électrique.)
Or, de telles forces sont exercées par les aimants et les courants placés à proximité. Les régions de l’espace entourant les aimants et les courants électriques sont donc des champs magnétiques.
Autour de notre planète Terre règne également un champ magnétique. Il est dû au mouvement des matières fluides à l’intérieur de la Terre, contenant des particules chargées.
Un champ magnétique peut être plus ou moins intense selon l’effet qu’il produit. Son intensité est exprimée en teslas (T). Le champ créé par un aimant ordinaire se situe à environ 10-3 T. Le champ terrestre vaut en moyenne 5∙10-5 T à proximité de la Terre. Un champ de même intensité règne à 4 mm d’un fil parcouru par un courant de 1 A. Pour obtenir un champ plus fort, il faut disposer un grand nombre de fils parcourus chacun par un fort courant.
Les électroaimants créent ainsi un champ magnétique plus ou moins puissant grâce à des bobines à un grand nombre de spires. Ces bobines comportent en plus un noyau de fer (fermé) qu’s’aimante dans le champ de la bobine renforçant celui-ci.