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L'accès aux données et la sécurité des données
S’attacher aux détails est parfois fastidieux, surtout lorsqu’il s’agit de contrats. Mais honnêtement, il faut parfois y regarder de plus près. Pratiquement personne ne se donne la peine de lire avec attention les clauses imprimées en petits caractères dans les conditions d’utilisation en s’identifiant sur Facebook, Twitter ou Amazon. Cela serait pourtant nécessaire, car en cliquant sur « Oui », nous souscrivons à un contrat par lequel nous vendons nos données. Les grands groupes Internet peuvent ensuite lire en nous comme dans un livre ouvert et en savent souvent plus sur nous que nous n’en savons nous-mêmes. C’est leur modèle commercial. Les livres, la pub, les films, et même peut-être les partis politiques – tout se vend ainsi plus facilement.
L’accès aux données et la sécurité des données sont un thème important, pas seulement sur Internet, mais aussi dans la recherche biomédicale. La vente de nouvelles thérapies personnalisées ou de polices d’assurance adaptées à l’état de santé permet de gagner infiniment plus d’argent que la publicité ou les livres. Un marché d’avenir – très intéressant pour la Silicon Valley.
Echange de données médicales
Au cours des semaines passées, nous avons discuté dans nos réunions de groupe à l’Institut de recherche Scripps d’une manière de mettre en place un projet de recherche transatlantique commun entre le LCSB et Scripps. Et cela ne s’avère pas évident du tout. Car l’entrée en vigueur du nouveau règlement européen sur la protection des données (RGPD) soumet l’accès et l’échange de données médicales à d’étroites restrictions.
À raison d’ailleurs. Qui souhaiterait en effet lire son dossier médical sur Facebook ? Mais en même temps, il est manifeste que l’échange et le partage de données médicales peuvent grandement concourir aux avancées de la médecine : un laboratoire découvre moins à lui seul que deux à trois laboratoires se complétant dans leurs expertises. La médecine profite du fait que les médecins et les chercheurs cliniques partagent leurs connaissances et leurs expériences avec d’autres scientifiques et discutent ensemble du succès ou de l’échec d’un traitement sur tel ou tel type de patient.
En soi, le règlement européen sur la protection des données a bien prévu la collecte, l’utilisation et l’échange de données médicales, car la recherche ne doit pas, en Europe non plus, être entravée par la protection des données. Pour chaque projet correspondant, l’accord d’une commission d’éthique et de protection des données est nécessaire. Jusque-là, tout va bien.
Aspects culturels
Mais c’est justement là que les aspects culturels font leur entrée. Les États-Unis sont un pays de fonceurs, et une demande chez Scripps, de son envoi à la décision, prend ainsi de quatre à huit semaines. L’Europe est plus réticente, trop à mon goût : selon mon expérience, de telles procédures y prennent bien plus de temps.
La sécurité des données est importante et ne doit pas être remise en cause – mais c’est aussi du temps perdu pour les patients. Et c’est justement ce qui leur manque. « Room for improvement », comme disent les Américains.
Auteur: Rudi Balling
Editeur: Melanie Reuter (FNR)
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Rudi Balling, directeur du Luxembourg Centre for Systems Biomedicine à l'Université du Luxembourg prend un semestre sabbatique jusqu’à l’automne prochain, avec le soutien d'une bourse INTER Mobility du Fonds National de la Recherche (FNR). Âgé de 64 ans, il profite de cette pause pour réaliser un séjour de recherche aux États-Unis. Tous les quinze jours, il nous relatera ses expériences dans le cadre de cette tribune publiée à l’origine dans le Luxemburger Wort. Le Luxemburger Wort et l’Université du Luxembourg nous ont donné leur aimable autorisation pour la reproduire ici.