(C) LIH

Pr Dirk Brenner (gauche), chef du groupe de recherche Experimental & Molecular Immunology au LIH et Henry Kurniawan (droite), doctorant dans ce groupe et premier auteur de l’étude.

Des scientifiques du Luxembourg Institute of Health (LIH) ont mis pour la première fois en évidence un mécanisme grâce auquel notre système immunitaire (SI) – mécanisme de défense propre à notre corps - pourrait guérir l’auto-immunité et agir contre le cancer. Plus spécifiquement, ils ont révélé dans des études précliniques comment il est possible de contrôler l’activité d’un type de globules blancs nommés lymphocytes T régulateurs (Treg) grâce à un régime nutritionnel qui régule spécifiquement certaines voies de leur métabolisme. Les réactions de défense de notre corps pourraient ainsi être équilibrées. Quel est le rôle de ces cellules ? En quoi leur contrôle peut-il prévenir l’auto-immunité et lutter contre le cancer ?

Des globules blancs indispensables à notre système immunitaire

Les cellules Treg agissent normalement comme une sorte de frein pour notre SI. « Si les Treg ne fonctionnent pas correctement, le SI devient incontrôlable et se retourne contre son propre corps. Cela peut entraîner de graves maladies auto-immunes comme la sclérose en plaques, le diabète de type I ou l'arthrite. », explique le Pr Brenner, chef du groupe de recherche Experimental & Molecular Immunology au LIH. Toutefois, un SI hautement réactif permet aussi de tuer des cellules cancéreuses de manière très efficace. Il est ainsi essentiel d’avoir un bon équilibre pour que les Treg ajustent leur rôle dans la prévention de l’auto-immunité et leur action anticancéreuse.

Guérir une maladie auto-immune grâce à un plan nutritionnel spécifique

L’équipe du LIH a montré que des altérations métaboliques - c’est-à-dire des changements dans les chaînes de production des protéines - peuvent être à l’origine de certaines réactions auto-immunes. Les chercheurs ont en effet pu observer que les réactions auto-immunes chez des souris mutantes provenaient d’une altération métabolique impliquant un acide aminé (élément constitutif des protéines) appelé sérine.

Les cellules Treg de ces souris avaient été génétiquement modifiées pour ne plus produire de glutathion, une molécule anti-oxydante qui neutralise les médiateurs moléculaires du stress cellulaire. Cette absence de glutathion a eu pour conséquence d’augmenter significativement le métabolisme de la sérine. Les chercheurs ont ainsi voulu corriger ces changements métaboliques en mettant au point un plan nutritionnel spécifique qui ne comprenait, entres autres, pas de sérine.

Sans appel, le régime ciblé a permis de contrer la réaction auto-immune et de prévenir le développement de la maladie. « Notre étude montre que l'absence de seulement 2 des 22 acides aminés peut guérir une maladie auto-immune complexe. Par conséquent, l'élucidation de la base métabolique et moléculaire exacte d'une maladie offre la possibilité de corriger ces anomalies métaboliques grâce à un régime alimentaire spécialement adapté à son mécanisme. Notre étude pourrait être un premier pas vers le traitement personnalisé des désordres métaboliques et de l'auto-immunité. », explique le Pr Brenner.

Vers de nouvelles voies thérapeutiques contre le cancer

L’équipe a aussi montré que des niveaux de glutathion inférieurs dans les Treg provoquaient une augmentation de l’activation des cellules immunitaires et menaient à une réaction anti-tumorale conséquente. « Ces résultats étonnants montrent l’énorme potentiel que modifier le métabolisme pourrait avoir dans la prévention de l’auto-immunité et dans la lutte contre le cancer, ce qui pourrait mener au développement d’une nouvelle génération d’immunothérapies. », explique le Pr Markus Ollert, directeur du Department of Infection and Immunity du LIH. 

Découvrez les résultats de l’étude, qui ont été publiés aujourd’hui dans la prestigieuse revue internationale « Cell Metabolism ».  

Retrouvez ci-après les explications de la recherche du LIH en BD et en vidéo : 

BD autoimmunity and cancer

Auteur : LIH
Editeur : Constance Lausecker & Michèle Weber
Photo : (C) LIH 

Infobox

Équipes de recherche impliquées

Le professeur Dirk Brenner est chef adjoint de recherche et stratégie au "Department of Infection and Immunity" du LIH. Il est professeur d'immunologie et de génétique au Luxembourg Center for Systems Biomedicine (LCSB) de l'Université du Luxembourg et professeur d'allergologie à la Syddansk Universitet. Il a reçu en 2015 la prestigieuse bourse ATTRACT Consolidator du Fonds national de la recherche du Luxembourg (FNR) pour mettre en place le groupe de recherche "Experimental & Molecular Immunology" au LIH. Le programme FNR-ATTRACT soutient les institutions nationales de recherche en élargissant leurs compétences dans des domaines de recherche stratégiques en attirant de jeunes chercheurs exceptionnels à fort potentiel au Luxembourg.

La présente étude a été réalisée en étroite collaboration avec une équipe nationale et internationale et a impliqué des partenaires du Department of Infection and Immunity du LIH, du Department of Oncology du LIH, du Braunschweiger Zentrum für Systembiologie (BRICS) de la Technische Universität Braunschweig (Allemagne), du Helmholtz-Zentrum für Infektionsforschung (Allemagne), du Campbell Family Institute for Breast Cancer Research de la University of Toronto (Canada), du Institut für Medizinische Mikrobiologie und Krankenhaushygiene de la Philipps-Universität Marburg (Allemagne), du Department of Environmental Health Sciences de la Yale School of Public Health (États-Unis), du Eliteforskningscenter ORCA du Odense Universitetshospital (Danemark), du Department of Biomedical Genetics and Wilmot Cancer Institute de la University of Rochester Medical Center (États-Unis), des Departments of Medical Biophysics and Immunology de la University of Toronto (Canada) et de la University of Hong Kong (Chine).

A propos du Department of Infection and Immunity du LIH

Le “Department of Infection and Immunity” du LIH mêle recherche basique et clinique-translationnelle pour comprendre les mécanismes complexes liés aux des maladies infectieuses et inflammatoires afin de découvrir de nouveaux outils de diagnostiques, de prévenir et de guérir les maladies humaines. S’appuyant sur un environnement de recherche hautement interdisciplinaire, la stratégie de recherche du “Departement of Infection and Immunity” se concentre sur la découverte et la validation expérimentales, faisant le lien avec l'application clinique et les développements technologiques pour répondre aux besoins médicaux majeurs non résolus dans les domaines de l'inflammation immunitaire (tel que les l'allergies, l'asthme, l'auto-immunité), le cancer et les maladies infectieuses (SIDA, la rougeole et le rubéole, entre autres).

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