(C) shotshop

Des chercheurs et médecins du LIH ont identifié une biomolécule qui, en fonction de son abondance dans le sang, permettrait de prédire le risque de développer une insuffisance cardiaque après un infarctus du myocarde.

Les maladies cardiovasculaires sont la première cause de mortalité au Luxembourg et en Europe. Si des patients ont réussi à survivre à une crise cardiaque, une partie d’entre eux peut encore développer par la suite une insuffisance cardiaque qui écourte considérablement l’espérance de vie.

Dans un projet international mené par le Luxembourg Institute of Health (LIH), des chercheurs et médecins ont identifié une biomolécule qui, en fonction de son abondance dans le sang, permettrait de prédire le risque de développer une insuffisance cardiaque après un infarctus du myocarde. La détection précoce pourrait même aider à prévenir l’apparition de l’insuffisance cardiaque.

Les résultats de l'étude ont été récemment publiés dans la prestigieuse revue scientifique américaine « Journal of the American College of Cardiology ».

Mieux vaut prévenir

Pour permettre un bon rétablissement d’un infarctus du myocarde aigu, il serait essentiel de pouvoir prévenir l’apparition d’une insuffisance cardiaque qui survient actuellement chez 15 à 20% des patients quelques mois plus tard.

L’insuffisance cardiaque est un affaiblissement du muscle cardiaque qui se traduit par une capacité de pompage limitée du cœur et donc un approvisionnement réduit en sang de l’organisme. Ceci peut avoir des conséquences graves : jusqu'à 60% des patients décèdent dans les cinq ans suivant l’infarctus.

Un biomarqueur à valeur pronostique

Les chercheurs spécialisés en maladies cardiovasculaires de la « Cardiovascular Research Unit » du LIH ont analysé des échantillons de sang de patients issus du registre luxembourgeois de l’infarctus conduit par le Dr Daniel Wagner au Centre Hospitalier de Luxembourg. Sur 409 patients, 19% ont développé une insuffisance cardiaque dans les quatre mois suivant l’infarctus. Des approches bio-informatiques, bio-statistiques et moléculaires ont permis à l’équipe d’identifier une biomolécule, aussi appelée biomarqueur, qui permet d’évaluer le risque de développer une insuffisance cardiaque.

Cette biomolécule appelée MICRA pour « Myocardial Infarction-associated Circular Ribonucleic Acid » est un acide ribonucléique circulaire produit dans les cellules sanguines. Des molécules du même type sont connues pour leur rôle dans la régulation de nombreux processus cellulaires. Les chercheurs ont pu montrer que les patients ayant une plus petite quantité de MICRA dans le sang auraient un risque plus élevé de développer une insuffisance cardiaque suite à un infarctus.

« MICRA est un biomarqueur très prometteur en raison de sa stabilité dans le sang», explique le Dr Yvan Devaux, responsable de la recherche sur les maladies cardiovasculaires au LIH. « Il s’agit d’un bon candidat pour le développement d’un test pronostique pour l’utilisation clinique. Nous envisageons aussi de nous pencher davantage sur l’étude des acides ribonucléiques circulaires car la compréhension du rôle et de la régulation de ces molécules dans les maladies cardiovasculaires révèlera probablement encore d'autres champs d'application », conclut-il.

Résultats consolidés par des équipes de recherche à l’étranger

Ce travail est le fruit d'une collaboration entre le LIH et des médecins et chercheurs de la Faculté de Médecine de l’Université de Leipzig en Allemagne et de l'Institut de Cardiologie de Varsovie en Pologne. L’Université de Leipzig a validé les résultats sur des échantillons de 233 participants provenant d’une grande étude de plus de 7000 patients appelée « Leipziger LIFE-Herzstudie ».

« Notre étude indépendante confirme les résultats du Luxembourg» dit Prof Markus Scholz de l’Université de Leipzig, qui a conduit les tests bio-statistiques. « Pour le moment nous ne comprenons pas encore la raison de la plus faible présence de MICRA chez les patients à risque», ajoute le Prof Ralf Burkhardt, responsable de l’analyse des échantillons pour la présente étude. « Ceci requiert plus de recherche fondamentale sur la fonction de la molécule ». 

Les trois équipes de recherche qui ont contribué à ce travail font partie d’un réseau de recherche plus large : Cardiolinc™ (http://cardiolinc.org). Ce réseau a été initié par la « Cardiovascular Research Unit » du LIH, sous la direction du Dr Devaux. Il s’agit d’une plateforme d’échange d’idées et de résultats de recherche sur la fonction des acides ribonucléiques (non-codants) dans les maladies cardiovasculaires. Cardiolinc™ regroupe actuellement plus de 40 partenaires issus de 14 pays partout dans le monde.  

Auteur: LIH
Photo: shotshop.com

 

 

Infobox

A propos du Luxembourg Institute of Health

Le Luxembourg Institute of Health est un institut de recherche public de pointe dans le domaine des sciences biomédicales. Bénéficiant d’une forte expertise en santé publique, en cancérologie, en maladies infectieuses et immunitaires ainsi qu’en stockage et traitement d’échantillons biologiques, l’institut s’engage pour la santé de la population au travers de ses activités de recherche. Au Luxembourg Institute of Health, plus de 300 collaborateurs travaillent dans le but de  générer des connaissances sur les mécanismes des maladies humaines et contribuer ainsi à la mise au point de nouveaux diagnostics, de thérapies innovantes et d’outils efficaces pour une médecine personnalisée. L'institut est le premier prestataire d'informations en matière de santé publique au Luxembourg, un partenaire fiable pour des collaborations sur des projets locaux et internationaux et un lieu de formation attractif pour les chercheurs en début de carrière. www.lih.lu

Publication

Myocardial Infarction-Associated Circular RNA Predicting Left Ventricular Dysfunction
Journal of the American College of Cardiology, Volume 68, Issue 11, Pages 1247-1248
Melanie Vausort, Antonio Salgado-Somoza, Lu Zhang, Przemyslaw Leszek, Markus Scholz, Andrej Teren, Ralph Burkhardt, Joachim Thiery, Daniel R. Wagner, Yvan Devaux

Contact scientifique

Dr Yvan Devaux
Deputy Head of Cardiovascular Research Unit
Department of Population Health
Luxembourg Institute of Health
E-mail: yvan.devaux@lih.lu

SCIENCE CHECK Ziel mir keng : Quels sont les enjeux des résistances aux antibiotiques ?

Partout dans le monde, les résistances aux antibiotiques augmentent. Pourquoi apparaissent-elles ? Quelle est la situati...

FNR
ÉTAT DES LIEUX SCIENTIFIQUE La résistance aux antibiotiques est-elle sous contrôle au Luxembourg ?

La surconsommation des antibiotiques a provoqué la prolifération inquiétante des bactéries résistantes au niveau mondial...

FNR
Portrait « Une réussite pour le Luxembourg et notre groupe de recherche »

Des scientifiques du Luxembourg Institute of Health (LIH) ont reçu le Prix Galien pour leur contribution exceptionnelle ...

LIH

Aussi dans cette rubrique

Téléphone portable à l'école
Temps d'écran Interdiction des smartphones à l’école : l'état actuel des connaissances scientifiques

Les écoles secondaires doivent-elles ou non interdire les smartphones dans les salles de classe et les cours de récréation ? Nous faisons le point sur l'état actuel de la recherche.

Démence Maladie d'Alzheimer : le point sur la recherche

La maladie d'Alzheimer s’installe de façon insidieuse et reste incurable à ce jour. Le Prof. Dr. Michael Heneka, directeur du LCSB, fait le point sur les avancées de la recherche et les traitements.

Prix Nobel de médecine 2024 La recherche au Luxembourg sur le thème des micro-ARN

Dr. Yvan Devaux du LIH travaille sur le thème de ce prix Nobel décerné aujourd’hui à deux chercheurs américains. Il nous explique l’importance de la découverte et sa propre recherche

LIH
Sciences du sport Comment les sportifs de haut niveau peuvent-ils améliorer leurs performances ?

C’est possible sans médicaments dopants interdits – grâce à la chaleur, au froid ou encore à l'altitude. Frédéric Margue explique comment une équipe au LIHPS accompagne des sportifs de haut niveau.